Les Servans

Dans de nombreux contes et légendes, on rencontre un type d’être bien particulier. Selon les régions, il est désigné par des noms différents: en Suisse Romande, on l’appelle servan(t).

Il n’est ni humain, ni animal, ce qui ne l’empêche pas d’être doté d’une certaine intelligence. Il peut être invisible ou visible, mais interfère avec les humains. Sa principale caractéristique est d’être capable d’agir sur le monde physique. Certains se montrent bienveillants et rendent volontiers service, alors que d’autres sont farceurs ou même franchement malveillants.

Les Servans en Suisse Romande

Voici quelques extraits de « Légendes des Alpes Vaudoises » par A. Cérésole (1885) qui cite les servans comme étant fréquents dans cette région et faisant l’objet de nombreuses légendes. Cérésole était pasteur, donc un intellectuel, et appartenait à une époque charnière où ces êtres étaient peu à peu relégués dans le folklore. Il a ainsi une position un peu distancée, tout en rapportant des histoires qui étaient considérées comme réelles par ceux qui les lui ont racontées. A cette époque, dans les Alpes, il semble qu’il existait encore beaucoup de récits rapportés par ceux-là même qui avaient eu affaire à des servans.

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Anima

‘homme a soulevé la lourde tenture et fait un pas à l’intérieur. L’obscurité est retombée sur ses talons. Lorsque ses yeux se furent habitués à la pénombre, il les a vues: Elles sont toutes là, certaines immobiles, assises ou accroupies, d’autres engagées dans un lent mouvement de danse. Un voile cache leur visage. L’homme est resté dans l’ombre, fasciné, muet.

On entend le bruit monotone de gouttes qui tombent dans un bassin derrière d’autres tentures. Sortent-elles du bain ? Parfois, l’une s’approche de sa compagne, lui chuchote quelques mots d’une langue inconnue, puis le silence retombe. Pensez-vous qu’elles n’ont pas vu l’intrus ? Ne vous y trompez pas ! Remarquez leur pose un peu apprêtée qui évoque une mise en scène. Il n’y a pas de doute: elles savent qu’il est là – elles attendaient même sa venue de toute éternité.

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La mémoire du Monde

l était une fois un petit gaillard, râblé, au raz des mottes. Il apparut un jour, déboulant d’un talus, les poings serrés, poussant un grand cri jubilatoire, roulant dans l’herbe grasse et le soleil du matin.

Il se retrouva tout étourdi, louchant sur la terre rousse qui lui maculait le nez, poussiéreux, assis au milieu du chemin qui ne mène nulle part. « Gou ? » demanda-t-il. « Gou ? » répéta-t-il. Comme personne ne répondait, il se leva et commença de marcher. Tantôt, il empruntait le chemin doux sous ses pieds nus, shootant les cailloux, poursuivant un carabe, tantôt il se lançait le nez en avant et les mains écarquillées dans l’herbe qui lui chatouillait le menton, lui arrachant des rires à s’en dérouler les tripes.

Tout était donc parfait jusqu’à ce que vienne la première nuit.

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La Pierre d’Outard

ue me manquent ces files de processionnaires d’autrefois.

Lorsque les jours raccourcissent – pour autant que l’obscurité qui m’entoure aujourd’hui me laisse en juger -, je crois entendre au loin leurs chants. Ils sont tout d’abord entonnés la bouche fermée. Puis, une fois le ruisseau atteint et les ablutions terminées, le chant se déploie et la forêt résonne de leurs accents emplis d’espoir. Au fur et à mesure de leur ascension, je sens leur souffle qui se fait court car la pente est raide et le chemin direct.

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